25 juin 2025
Temps de lecture : 5 minutes
Une vaste étude mondiale révèle des divergences d’émotions concernant le climat et examine leurs conséquences
Les populations du nord de l’Europe sont les moins optimistes. En Grèce, en Espagne et en Italie, les gens sont tristes et en colère. Et les personnes vivant dans les pays du Sud et aux États-Unis sont les plus optimistes.
Par Sarah DeWeerdt

Selon une nouvelle étude, l’espoir et l’inquiétude sont les émotions les plus souvent associées à l’appui d’approches controversées pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre. Ces conclusions viennent s’ajouter à un nombre croissant d’études sur les émotions liées au climat et leur relation avec les perceptions et les comportements vis-à-vis des changements climatiques et des politiques visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Cette nouvelle étude est l’une des premières à explorer les émotions liées aux interventions climatiques, des approches qui ne visent pas à réduire directement les émissions, mais à en inverser les conséquences, soit en éliminant le dioxyde de carbone de l’atmosphère, soit en réfléchissant les rayons du soleil loin de la Terre.
Certaines de ces technologies sont encore incertaines, présentent des risques et sont parfois décrites comme offrant de « faux espoirs » qui détournent l’attention des efforts de réduction des émissions et de la préparation de la société et des infrastructures humaines aux conséquences des changements climatiques. Mais la multiplication des catastrophes climatiques et la lenteur des progrès dans la réduction des émissions attirent davantage l’attention sur les interventions climatiques.
Dans le cadre de la nouvelle étude, l’équipe de recherche a mené un sondage en ligne auprès de plus de 30 000 personnes dans 30 pays du monde entier. Le sondage portait sur cinq émotions liées au changement climatique : la peur, l’espoir, la colère, la tristesse et l’inquiétude. C’est la première fois que ces émotions sont étudiées en lien avec le climat à une échelle géographique aussi large.
Les personnes interrogées ont également été invitées à donner leur avis sur les risques et les avantages de dix interventions climatiques différentes et à indiquer dans quelle mesure elles soutenaient ces technologies. Celles-ci comprennent des stratégies fondées sur les écosystèmes visant à éliminer le carbone de l’atmosphère, telles que la plantation de forêts et l’adoption de technologies agricoles permettant de stocker davantage de carbone dans les sols; des stratégies misant sur la haute technologie pour éliminer le carbone atmosphérique, telles que la capture directe du dioxyde de carbone dans l’air; et des technologies visant à réduire le réchauffement causé par le soleil, telles que la pulvérisation de particules dans la haute atmosphère ou l’utilisation d’un miroir géant pour réfléchir la lumière du soleil vers l’espace.
Après avoir pris en compte les croyances générales des personnes interrogées concernant la science et la technologie comme solution aux problèmes, l’aversion à l’égard de toute intervention sur la nature, l’identité environnementale et les croyances relatives aux changements climatiques, l’équipe de recherche a constaté que l’inquiétude était l’émotion liée au climat la plus souvent rapportée dans tous les pays.
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Cependant, « les émotions liées aux changements climatiques sont complexes et varient considérablement d’un pays à l’autre », observe Chad M. Baum, membre de l’équipe de recherche et professeur adjoint en développement et technologie des affaires à l’Université d’Aarhus au Danemark. En général, les populations des pays riches rapportent des émotions liées au climat moins fortes, font valoir Chad M. Baum et ses collègues dans un article publié dans la revue Risk Analysis.
« Les différences les plus importantes concernent l’espoir face aux changements climatiques », souligne Chad M. Baum. Parmi les 12 pays les plus optimistes, 11 sont des économies en développement et émergentes, telles que le Kenya, l’Inde et l’Indonésie. Un seul pays du Nord, les États-Unis, figure sur la liste des plus optimistes.
Mais il y avait aussi des différences au sein de groupes de pays ayant des économies comparables. Par exemple, les pays d’Europe du Sud, soit l’Espagne, l’Italie et la Grèce, étaient les plus en colère et les plus tristes face aux changements climatiques, alors que les pays d’Europe du Nord et les pays nordiques rapportaient peu ces émotions. « Ces résultats pourraient présager des difficultés à organiser une stratégie régionale de réponse aux changements climatiques » dans le cadre des structures de l’Union européenne, selon Chad M. Baum.
L’équipe de recherche a constaté que l’espoir face aux changements climatiques était le facteur prédictif le plus fort du soutien d’une personne aux interventions climatiques. L’inquiétude était le deuxième facteur prédictif en importance. Les personnes qui avaient de l’espoir ou qui s’inquiétaient au sujet des changements climatiques étaient particulièrement susceptibles de soutenir des interventions plus novatrices et controversées, telles que les stratégies de gestion du rayonnement solaire et la capture directe du dioxyde de carbone dans l’air.
« À l’inverse, la tristesse ou la colère n’étaient pertinentes que pour les méthodes d’élimination du dioxyde de carbone plus connues et fondées sur les écosystèmes, telles que le boisement et la séquestration du carbone dans le sol, explique Chad M. Baum. Les personnes les plus tristes étaient plus favorables à ces options, tandis que celles qui étaient le plus en colère y étaient moins favorables. »
D’autres recherches sont nécessaires pour comprendre les dimensions culturelles des émotions liées au climat. « Il est surprenant que les personnes interrogées dans les économies en développement du Sud soient à la fois optimistes et inquiètes face aux changements climatiques », commente Chad M. Baum. Ce constat « va à l’encontre de l’idée que nous nous faisons de ces émotions dans les pays occidentaux développés. Comme toujours, il faut se garder d’extrapoler les résultats d’une étude portant sur un sous-ensemble restreint de pays occidentaux à l’ensemble du monde. »
Source : Baum C.M. et coll., « A new hope or phantom menace? Exploring climate emotions and public support for climate interventions across 30 countries », Risk Analysis, 2025.
Article original en anglais : https://www.anthropocenemagazine.org/2025/03/huge-new-study-exposes-disparate-climate-emotions-around-the-world-and-their-consequences/
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Anthropocène est la version française d’Anthropocene Magazine. La traduction française des articles est réalisée par le Service de traduction de l’Université Concordia, la Durabilité à l’Ère Numérique et le pôle canadien de Future Earth.